c'est un petit emplois, rien de bien spécial, rien de bien important, mais moi j'ai le coeur qui bat à cent à l'heure pendant que je distribue le courrier de tous les employés de ce magazine. je souris comme le soleil ce matin et mes sandales mauve pastel claquent sur le sol chaque fois que je fais un pas. j'entre dans un grand bureau et mes yeux se remplissent d'étoiles. y'a tellement de merveilles ici, tellement de toiles et de dessins, de figurines et de dizaines d'autres babioles. je regarde partout en poussant des 'oooh' et des 'aaah' d'admiration.

ce sont des couleurs qui éclatent contre le mur. ce sont comme des arcs-en-ciel qui te traversent le corps, de la tête aux pieds. tu crois que tu vas devenir riche, mais en fait, le nain roux n'arrive jamais. c'est triste, parce que la maison aurait besoin d'un nain roux. peut-être pour enflammer les gars au travail, peut-être pour nous donner de l'argent. mon téléphone vibre dans ma poche, je le ferme. je ne peux plus, et cette fille se retrouve dans mon bureau à tout observer.

- bonjour. je peux faire quelque chose pour toi ?

c'est un arc-en-ciel. juste par ses vêtements.

je crois que mes yeux brillent comme un ciel étoilé. ce bureau est magique et je voudrais y découvrir tout ses trésors cachés. une voix résonne, elle me fait sursauter. j'ai l'impression de lever du sol (je crois que c'est ce qui se passe réellement) et je sens mon coeur battre super rapidement. il fait un solo de grosse caisse, je l'entend dans ma poitrine. je me retourne et
je le vois.
le chef-éditeur.
cet homme si important.
je cligne des yeux.
ils sont ronds comme ceux des filles surprises dans les mangas.

- je... je... courrier.

je pointe les enveloppes du doigt.
le visage rouge et barbe à papa.
il est si beau.

elle vient de se faire frapper par une tomate. ses joues, elles sont rouges. si rouge, comme un volcan en éruption. je recule d'un pas, peut-être qu'elle va exploser. imploser. je souris. sourire, ça peut calmer une tempête en colère. je sais, c'est l'expérience à chasser les ouragans, à chasser les femmes.

- merci. et tu es ?

elle peut ressembler à la nouvelle. elle va bien avec les détails qu'on m'a dit. c'est comme jouer à tu me fais un dessin, mais version tu me fais une personne. je rigole.

il... il a comprit ? sûrement. je ne suis pas nulle en mimes. sur mon visage, le rouge ne disparaît pas. il reste, il semble coller à ma peau. son sourire fait exploser mon coeur. j'crois qu'il y a des papillons dans mon ventre et des feux d'artifice dans mon palpitant. ça fait boum boum trop fort dans mes oreilles. ça couvrirait presque ses mots, son rire.

- noushka... je suis le nouvelle pour... em... le courrier...

je baisse le regard, je fixe le plancher.
t'es nulle, noushka.
mes mots se coincent dans ma gorge.
mes mots s'écorchent entre mes lèvres.

- vous êtes... le owner du magazine ?

je crois voir des confettis passer dans ses yeux, peut-être des artifices. des trucs qui brillent. une explosion va arriver, elle va décoller, s'envoler et atterrir sur la lune peut-être, ou dans une bouche d’égout. ça parle pas allemand, ça parle un peu anglais ce petit truc rose.

- ouais, je suis le owner du magazine. j'suis aussi achill.

achill, c'est plus beau que de s'appeler chef-éditeur. ça fait plus intime, après, c'est elle qui voit comment elle veut m'appeler noushka. c'pas allemand ce nom.

- hum, t'es pas de berlin je me trompe ?

l'évidence. c'est seulement pour bien m'informer. peut-être qu'elle sort d'une grotte. non, elle est trop ensoleillée et les couleurs lui vont trop bien pour qu'elle vienne d'une grotte. son petit nez me fait penser à un cochon, c'est mignon.

je rigole nerveusement à ce qu'il vient de dire. parce que, est-ce que j'ai le droit de rire ? je sais pas trop, c'était de l'humour, non ? je... oui... sûrement. je serre bien fort les lettres que j'ai entre les mains et j'essaie de respirer correctement. faut se calmer. c'est juste un garçon.
non.
pas juste un garçon.
c'est un homme.
très joli.
arrête de sourire, achill-owner-du-magazine.
je secoue la tête en signe de négation pour répondre à sa question.

- non. moi être de tokyo.

et moi être une conne qui parle mal allemand.

- je m'excuse. je parle pas facile allemand.

je dépose rapidement le tas de courrier sur son bureau.